Explicationlittéraire : Victor Hugo, Hernani, III du début de la scène jusqu'à C'est la mort ! Introduction L'acte III scelle le destin d'Hernani. A la scène Hernani entre chez Dom Ruy Gomez, déguisé en pèlerin. A la fin de la scène 2 et au début de la scène il découvre que le vieux duc s'apprête à célébrer ses noces avec Dona Restauration Waterloo, signé Napoléon, Hugo ou Cambronne ? C’est une vraie question, citations à l’appui ! C’est en tout cas le dernier combat de l’empereur et la bataille la plus commentée au monde - avant ou après la victoire d’Austerlitz ? Les commentaires sont allégés, les coupes signalées … Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations. Derrière un mamelon, la garde était massée. La garde, espoir suprême, et suprême pensée […] Tranquille, souriant à la mitraille anglaise, La garde impériale entra dans la fournaise. »1943 1802-1885, Les Châtiments, L’Expiation 1853 Napoléon engage contre l’anglais Wellington la Vieille Garde l’élite, à côté de la Jeune et de la Moyenne Garde … La Garde, décimée, recule en ordre … L’armée napoléonienne se débande, pour la première fois. Seule la partie de la garde commandée par Cambronne tient encore les lignes. Un général anglais leur cria Braves Français, rendez-vous ! Cambronne répondit Merde ! […] Foudroyer d’un tel mot le tonnerre qui vous tue, c’est vaincre. »1944 Victor HUGO 1802-1885, Les Misérables 1862 Le mot de Cambronne » est passé à la postérité anecdote rapportée par Hugo dans son roman … Cambronne, engagé parmi les volontaires de 1792, participe aux campagnes de la Révolution et de l’Empire. Major général de la garde impériale, il suit Napoléon à l’île d’Elbe, revient avec lui en 1815, est fait comte et pair de France sous les Cent-Jours et s’illustre à Waterloo, dans ce dernier carré » de la Vieille Garde … La garde meurt et ne se rend pas. »1945 Général CAMBRONNE 1770-1842, paroles gravées sur le socle en granit de sa statue à Nantes sa ville natale … Il n’est cependant pas sûr que cette phrase ait été prononcée à Waterloo, Cambronne l’a démenti Je n’ai pas pu dire la Garde meurt et ne se rend pas’, puisque je ne suis pas mort et que je me suis rendu. » … Le Merde » est sans doute plus authentique, dans le feu de l’action, même si le général en refusa également la paternité. Garde. – La garde meurt et ne se rend pas ! Huit mots pour remplacer cinq lettres. »1946 Gustave FLAUBERT 1821-1880, Dictionnaire des idées reçues posthume, 1913 La plus grande défaite de Napoléon fera sa gloire L’homme qui a gagné la bataille de Waterloo, c’est Cambronne », dit Victor Hugo. Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! Morne plaine !Comme une onde qui bout dans une urne trop pleine,Dans ton cirque de bois, de coteaux, de vallons,La pâle mort mêlait les sombres bataillons. »1947 Victor HUGO 1802-1885, Les Châtiments, L’Expiation 1853 Napoléon est contraint d’ordonner la retraite perte de 45 000 hommes dont 30 000 Français. Waterloo est la bataille la plus commentée au monde, entre mythe, légende et réalité. La bataille de Waterloo a été gagnée sur les terrains de jeu d’Eton. »1948 Duc de WELLINGTON 1769-1852. Revue politique et littéraire revue bleue 1932 Principal artisan de la victoire anglaise de Waterloo, assistant à un match de cricket à Eton, il témoigne de la foi toute patriotique en ce sport national – même s’il n’est pas personnellement un grand sportif … Depuis la tragique guerre d’Espagne, il a multiplié les victoires contre les armées napoléoniennes, jusqu’à ce dernier acte du 18 juin 1815. Waterloo n’est point une bataille c’est le changement de front de l’univers. »1949 Victor HUGO 1802-1885, Les Misérables 1862 Dans ce roman en dix volumes, Hugo brosse une vaste fresque historique, sociale, humaine. Et Waterloo demeure à jamais l’un des moments clés de l’histoire de la France. p>Le prodige de ce grand départ céleste qu’on appelle la mort, c’est que ceux qui partent ne s’éloignent point. Ils sont dans un monde de clarté, mais ils assistent, témoins attendris, à notre monde de ténèbres. Ils sont en haut et tout près.Discours sur la tombe d’Émilie de Putron, 19 janvier 1865Citations de Victor HugoVictor Hugo L’œuvre se présente comme le journal d’un prisonnier qui se sait condamné à mort. Chapitre 1 Un prisonnier, dont on ignore le nom et le crime, est enfermé dans une prison depuis cinq semaines. Condamné à mort, cette pensée devient une obsession. Chapitre 2 L’esprit du condamné à mort s’arrête sur des évènements particuliers son procès, sa condamnation à mort ainsi que sa réaction lors du verdict. Chapitre 3 Le prisonnier tente de prendre une certaine distance avec sa condamnation. Il semble accepter son sort. Pour cela, il philosophe sur le fait que tous les hommes sont condamnés à mort, et tous sont pour le moment en sursis. Chapitre 4 Il est transféré dans une autre prison, à Bicêtre. Il décrit la prison. Chapitre 5 Arrivée à la prison. Grâce à sa docilité et à quelques mots latins, il améliore ses conditions de vie dans la prison. Il évoque l’argot qui est pratiqué en prison. Chapitre 6 Le narrateur décide d’écrire pour oublier ses angoisses, et pour, peut-être, servir l’abolition de la peine de mort. Chapitre 7 Finalement, le narrateur se demande à quoi lui servirait de sauver d’autres hommes grâce à son écrit, puisque lui ne sera plus. Chapitre 8 Il compte le temps qui lui reste à vivre… Chapitre 9 Son testament est fait. Il pense alors à sa mère, sa femme et surtout à sa fille, pour laquelle il s’inquiète tout particulièrement. Chapitre 10 Description du cachot sans fenêtres, du corridor et des autres cachots. Chapitre 11 Description des murs de sa cellule, sur lesquels les anciens prisonniers ont laissé des inscriptions. Le narrateur est perturbé par le dessin de l’échafaud. Chapitre 12 Le prisonnier reprend sa lecture des inscriptions murales. Il découvre les noms de criminels qui ont séjourné en ces lieux. Chapitre 13 Le prisonnier raconte le départ des forçats au bagne de Toulon. Le spectacle, odieux, lui provoque un évanouissement. Chapitre 14 Il se réveille à l’infirmerie. De la fenêtre, il regarde les forçats partir. Il dit préférer la mort aux travaux forcés. Chapitre 15 De retour dans sa cellule, l’idée de la mort l’envahit il pense à l’évasion. Chapitre 16 Le prisonnier se souvient de la liberté qu’il a ressentie à l’infirmerie, de la voix de la jeune fille qui chantait. Chapitre 17 Il pense à s’évader, s’imagine libre embarquant pour l’Angleterre, mais l’arrivée d’un gendarme dans sa rêverie brise ses rêves de liberté. Chapitre 18 Six heures du matin. Le guichetier entre dans le cachot et demande au narrateur ce qu’il souhaite manger. Ce dernier se demande alors si l’échafaud sera pour ce jour. Chapitre 19 Le directeur de la prison rend visite au condamné qui comprend que son heure est arrivée. Chapitre 20 Le narrateur pense à son geôlier, à la prison… Chapitre 21 Le condamné reçoit deux visites celle du prêtre, puis celle de l'huissier. Ce dernier lui annonce que le pourvoi est rejeté, que son exécution aura lieu le jour même et qu’il reviendra le chercher une demi-heure plus tard. Chapitre 22 Le condamné est transféré à la conciergerie. Il raconte le voyage et sa discussion avec le prêtre et l'huissier pendant le trajet. Chapitre 23 Le condamné fait la connaissance d’un condamné à mort qui séjournera dans la même cellule à Bicêtre. Ce dernier, fils d'un ancien condamné à mort, lui raconte son histoire. Il lui prend sa redingote. Chapitre 24 Le narrateur est en colère que l’autre condamné ait sa redingote. Chapitre 25 Transféré dans une autre cellule, il demande une chaise, une table, ce qu'il faut pour écrire et un lit. Chapitre 26 Le condamné pense à sa petite fille qui sera sans père et peut-être repoussée par les autres à cause de lui. Chapitre 27 Le narrateur se demande comment on meurt sur l'échafaud. Chapitre 28 Il se souvient avoir vu, une fois, une guillotine sur la place de Grève. Chapitre 29 Le condamné pense à cette grâce qui ne vient pourtant pas. Chapitre 30 Nouvelle visite du prêtre. Il parle machinalement et ne semble pas touché par la souffrance du prisonnier. Il ne réussit pas à manger. Chapitre 31 Quelqu’un vient prendre les mesures de la cellule, car la prison va être rénovée. Chapitre 32 Un autre gendarme prend la relève. Il demande au prisonnier de venir chez lui après son exécution pour lui révéler les numéros gagnants à la loterie. Pour profiter de la situation, le prisonnier lui propose d’échanger leurs vêtements. Le gendarme refuse, car il comprend qu’il veut s’évader. Chapitre 33 Le narrateur se souvient de son enfance et de sa jeunesse. Il pense tout particulièrement à Pepa, une jeune andalouse dont il était amoureux. Chapitre 34 Le condamné pense à son crime, au sang de sa victime et au sien. Chapitre 35 Le narrateur pense à tous ceux qui vivent normalement autour de lui à Paris. Chapitre 36 Il se souvient du jour où il est allé voir la grande cloche de Notre-Dame de Paris Chapitre 37 Description brève de l'hôtel de ville. Chapitre 38 Le condamné ressent une douleur violente. Plus que deux heures quarante-cinq à vivre. Chapitre 39 Sous la guillotine, on ne souffre pas le narrateur se demande comment on peut affirmer cela alors qu’aucun condamné déjà exécuté ne peut le confirmer. Chapitre 40 Le jeune détenu pense au roi, de qui une grâce pourrait venir. Chapitre 41 Réalisant qu'il va bientôt mourir, il demande un prêtre pour se confesser, un crucifix à baiser. Chapitre 42 Il s’endort. Il fait un cauchemar et se réveille baigné d'une sueur froide. Chapitre 43 Sa fille lui rend visite, mais elle ne le reconnaît pas. Elle croit que son père est mort. Le condamné n’a plus d’espoir. Chapitre 44 Plus qu’une heure. Suite à la visite de sa fille, le condamné est désespéré. Chapitre 45 Il pense au peuple qui viendra assister au spectacle » de son exécution. Il se dit que parmi eux, certains suivront, sans le savoir, ce même chemin. Chapitre 46 Sa fille est partie. Il veut lui écrire quelques mots pour se justifier. Chapitre 47 Note de l'éditeur les feuillets qui se rattachent à celui-ci sont perdus ou peut être que le condamné n'a pas eu le temps de les écrire. Chapitre 48 Le condamné se trouve dans une chambre de l'hôtel de ville. On vient lui dire qu'il est l’heure. On lui coupe les cheveux et le collet avant de lier ses mains. On se dirige ensuite vers la place de Grève devant la foule qui attend l'exécution. Chapitre 49 Le condamné demande qu’on lui donne cinq minutes pour attendre la grâce qui ne vient pas. Le juge et le bourreau sortent de la cellule. Il reste seul avec le gendarme. Il espère encore mais on vient le chercher… Sujet Ce que c'est que la mort ( de Victor HUGO (1802-1885) Mer 24 Fév - 18:06. Ce que c'est que la mort. Ne dites pas : mourir ; dites : naître. Croyez. On voit ce que je vois et ce que vous voyez ; On est l'homme mauvais que je suis, que vous êtes ; On se rue aux plaisirs, aux tourbillons, aux fêtes ; On tâche d'oublier le bas, la fin L’œuvre fleuve de Victor Hugo met le génie littéraire au service de la défense d’une humanité broyée par l’injustice. Elle donne une postérité aux damnés de la terre et de la mer. Leurs cris n’ont pas fini de résonner. Victor Hugo. - Janvier 2016. Un camp de roms sous la passerelle du boulevard Ney, à Paris. 400 personnes vivent alors le long de cette ancienne voie de chemin de fer, où le souvenir napoléonien tutoie une misère bien actuelle. - Récit - Journaliste au service Forum Publié le 14/10/2021 à 1903 Temps de lecture 10 min En 1848, Victor Hugo monte à la tribune de l’Assemblée nationale constituante. Il lance aux parlementaires de la toute neuve Deuxième République française Le XVIIIe siècle a aboli la torture, le XIXe siècle abolira sans doute la peine de mort ». Chez Victor Hugo, Robert Badinter aime retrouver l’étincelle du combat qu’il a emporté il y a tout juste quarante ans, alors que la peine de mort trouvait encore un large appui dans l’opinion publique française. Le 9 octobre 1981, le Journal officiel publiait la loi qui abolissait la peine capitale. L’avocat Badinter devenu Garde des Sceaux venait de gagner sa plus belle plaidoirie, une victoire emblématique de l’ère Mitterrand. Lors de récentes commémorations organisées au Panthéon, Emmanuel Macron s’est engagé à relancer le combat pour l’abolition universelle », au plan mondial donc, avec une rencontre au plus haut niveau », début 2022. Ce n’est bien sûr pas Victor Hugo qui a inventé » l’abolition de la peine de mort. Il est question de tordre le cou à l’application la plus extrême de la loi du Talion depuis le milieu du XVIIIe siècle, moment où le juriste Cesare Beccaria Bonesana mit en doute l’efficacité de l’exécution capitale dans Des Délits et des Peines. Il me paraît absurde que les lois, qui sont l’expression de la volonté publique, qui détestent et punissent l’homicide, en commettent un elles-mêmes, et que pour éloigner les citoyens de l’assassinat, elles ordonnent un assassinat public », écrit ce Milanais qui préfère l’esclavage perpétuel à la mort. L’idée fait son bonhomme de chemin dans différents cénacles. En 1768, le grand-duché de Toscane abolit la peine capitale. Le royaume de Tahiti en fera de même en 1824. Le signe spécial et éternel de la barbarie » Mais la France du docteur Guillotin, elle, n’est pas près de ranger la veuve » au musée. Le 15 septembre 1848, lorsque Victor Hugo prononce son discours abolitionniste devant la Constituante, la peine capitale va de débats en déboires. Le moment est néanmoins important, car il s’agit de donner à la très brève Deuxième République sa Constitution Qu’est-ce que la peine de mort ?, lance à ses pairs l’écrivain devenu parlementaire. La peine de mort est le signe spécial et éternel de la barbarie. Partout où la peine de mort est prodiguée, la barbarie domine ; partout où la peine de mort est rare, la civilisation règne. Ce sont là des faits incontestables. » Hugo reproche à ses opposants de vouloir continuer à exécuter les criminels de droit commun. Je vote l’abolition pure, simple et définitive de la peine de mort », conclut-il. Cet engagement n’a rien de neuf pour l’écrivain français. En 1829, Victor Hugo écrit Le Dernier Jour d’un condamné qu’il renonce d’abord à signer. En un long monologue intérieur, le meurtrier qui attend le bourreau livre ses souvenirs, ses angoisses, ses regrets, ses souffrances, son rejet au ban de l’humanité. C’est en traversant peu auparavant la place de l’Hôtel-de-Ville, à Paris, où le bourreau graissait la guillotine en prévision d’une exécution, que l’auteur a conçu ce roman à thèse, descendu par une partie de la critique, salué en revanche par Sainte-Beuve et Alfred De Vigny. La force de son plaidoyer réside dans le choix d’avoir anonymisé le personnage du condamné, un homme comme les autres livré à la mort pour un crime quelconque, ce parti pris renvoyant le lecteur aux grands principes plutôt qu’au simple récit. Hugo veut servir l’universel. Victor même pas mort Victor Hugo est né le 26 février 1802 à Besançon et mort le 22 mai 1885 à Paris. Poète, dramaturge, écrivain, romancier et dessinateur romantique français, il reste dans nos souvenirs comme ce grand-père immortalisé par Nadar, lourd d’une vie de convictions et de travail. Et pourtant, Victor n’est pas mort. Ses craintes et ses combats assurent le relais posthume. En témoigne ce sondage Ipsos/Le Monde qui, en 2020, donnait 55 % de Français favorables au rétablissement de la peine capitale. Depuis, Eric Zemmour leur a donné raison, même s’il estime qu’il y a tout de même d’autres priorités. Je ne pense pas qu’on ait bien fait d’abolir la peine de mort. Philosophiquement, j’y suis favorable », tranche le polémiste. Aujourd’hui, Le Dernier Jour d’un condamné est toujours étudié dans les lycées français. L’œuvre présente l’avantage d’être accessible par sa concision, là où Les Misérables pèsent leurs 365 chapitres, un par jour. Les deux récits poursuivent cependant un objectif commun. Dans ses romans, explique Jean-Marc Hovasse qui a consacré une ample biographie à l’écrivain français, l’ambition est de s’adresser à tout le monde, aux érudits comme à ceux qui ont un accès plus limité à la culture. Le but de Victor Hugo a toujours été d’élever le niveau de ses lecteurs. Enormément d’ambition est venue de son humanisme. Il était contre la littérature de pur divertissement, même s’il en connaissait les ficelles ». Ses livres se sont énormément vendus de son vivant et par la suite, avant que le cinéma ne prenne le relais. En 1956, le réalisateur Jean Delannoy donne une nouvelle jeunesse à Notre-Dame de Paris, avec pour acteurs principaux Gina Lollobrigida et Anthony Quinn. La musique, la comédie musicale, le théâtre, des jeux vidéos tous récitent aujourd’hui du Victor Hugo, adaptant et réadaptant au fil des années cette œuvre aux airs de conte défait, mêlant critique sociale et heroïc fantasy dans l’ostentation d’un amour difforme. En 2019, l’incendie de Notre-Dame a remis le roman de Victor Hugo à l’honneur. euros ont été récoltés grâce à la vente de l’édition Gallimard du classique hugolien et donnés à la reconstruction de la cathédrale gothique. L’histoire renvoie ainsi ses balles. En 1831, alors que paraissait Notre-Dame de Paris, Hugo critiquait le sort réservé au monument parisien. C’est ainsi qu’on agit depuis tantôt 200 ans avec les merveilleuses églises du moyen âge, écrivait-il. Les mutilations leur viennent de toutes parts, du dedans comme du dehors. Le prêtre les badigeonne, l’architecte les gratte, puis le peuple survient, qui les démolit… ». Hugo défenseur du patrimoine, défenseur des petits et des opprimés, défenseur de l’âme humaine. Hugo le réaliste-idéaliste, le romantique, le croyant. Hugo l’auteur pulsionnel d’une œuvre romanesque ambitieuse, d’une poésie lyrique, de romans à thèse, de pièces de théâtre Cromwell, Hernani ou encore Ruy Blas, de mémoires et de carnets de voyage. Hugo raconte, digresse, s’emporte. Hugo est une bête de travail littéraire. De l’écriture à la politique En 1848 toutefois, il passe de l’écriture à la politique. Elu parlementaire, il appuie la candidature de Louis-Napoléon Bonaparte à la présidence de la Deuxième République. L’homme qui se revendique de la descendance de Napoléon Ier lui paraît alors distingué et intelligent ». Ce sont les premières élections depuis 1792 à se dérouler au suffrage universel masculin. Et comme Victor Hugo tient le vainqueur d’Austerlitz pour un héros et un génie – son père Joseph Léopold Sigisbert Hugo a été maréchal de camp sous le Premier Empire –, il soutient logiquement le dernier prince impérial Louis-Napoléon Bonaparte à la présidence de la République. Pari gagné. Mais rapidement la brouille s’installe entre le parlementaire et le nouveau chef de l’Etat, peut-être en raison de dissensions sur l’enseignement. Contre l’Eglise et ses soutiens, Hugo défend l’école laïque. Hugo le conservateur se fait de plus en plus progressiste. Après le coup d’Etat du 2 décembre 1851 qui fait de Louis-Napoléon Bonaparte le nouveau Napoléon III et marque l’avènement du Second Empire, Victor Hugo devient l’un de ses plus farouches opposants. Il doit se cacher et quitte la France pour la Belgique. Il est proscrit. On connaît la suite. Hugo s’installe à la Grand-Place de Bruxelles durant huit mois. Son premier pamphlet contre le nouvel empereur – Napoléon Le Petit – incite les autorités belges à lui demander de quitter le territoire durant l’été 1852. C’est le début de l’exil pour Jersey et Guernesey. Hugo ne rentrera en France qu’après la bataille de Sedan 1870 qui marque la défaite de la France face à la Prusse. C’est la fin du Second Empire et le début de la IIIe République. A plusieurs reprises, l’écrivain a parcouru la Belgique en tous sens, ponctuant ses visites de comptes rendus au style très hugolien. Mais c’est à Jersey, en 1852, qu’il écrit son célèbre poème L’expiation. Waterloo et sa morne plaine » tiennent la vedette dans ces vers passionnés, bien qu’à cette époque l’auteur n’ait toujours pas mis les pieds sur le champ de bataille. Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine ! Comme une onde qui bout dans une urne trop pleine, Dans ton cirque de bois, de coteaux, de vallons, La pâle mort mêlait les sombres bataillons. D’un côté c’est l’Europe et de l’autre la France. » Ouvrez-moi, je viens pour vous » Waterloo est aussi l’endroit où, en 1861, Victor Hugo termine les Misérables, son roman le plus fort, le plus emblématique, le plus universel. Dans la préface, il plante un décor qui n’a pas vieilli Tant que les trois problèmes du siècle, la dégradation de l’homme par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l’atrophie de l’enfant par la nuit, ne seront pas résolus … tant qu’il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles. » A son éditeur italien Daelli, Hugo écrit que Partout où l’homme ignore et désespère, partout où la femme se vend pour du pain, partout où l’enfant souffre faute d’un livre qui l’enseigne et d’un foyer qui le réchauffe, le livre Les Misérables frappe à la porte et dit Ouvrez-moi, je viens pour vous ». Pour Victor Hugo, la misère est le vêtement du genre humain ». En 1871, le déclenchement de la Commune de Paris prête une scène aussi spectaculaire que réelle à l’histoire romancée de Jean Valjean, de Cosette et de Javert. L’auteur prend fait et cause pour les Communards qu’il propose d’accueillir à Bruxelles où il est venu régler la succession de son fils Charles. Les autorités belges sont furibardes, l’affaire tourne à la polémique, fait des vagues dans la presse et au parlement. Hugo est prié de quitter le pays. Le 1er juin 1871, il prend le train et se réfugie à Vianden au Luxembourg où il écrit L’Année terrible, qui contient ses poèmes dédiés aux insurgés Les Fusillés et À ceux qu’on foule aux pieds. L’œuvre de Hugo est immense. Par la production, par le talent, par l’extraordinaire empathie dont l’auteur fait preuve pour les damnés de son époque et pour sa capacité visionnaire. Plus d’un siècle et demi après la sortie des Misérables, un être humain sur six reste confronté à la faim, les violences faites aux femmes sont dénoncées chaque jour, la moitié des pauvres de la planète sont des enfants. Damnés de la mer Damnés de la terre, mais aussi damnés de l’océan comme dans Les Travailleurs de la mer, ce roman inspiré par le nouvel univers de celui qui durant ses dix-neuf années d’exil va regarder la France depuis les îles Anglo-Normandes. La mer devient, écrit l’essayiste Simon Leys, une compagne, une inspiratrice, un objet de contemplation quotidienne, attentive et passionnée ». Elle est ce théâtre homérien où bouillonnent des éléments tout au service de dieu, obstinés dans leur volonté de ramener l’homme à sa piètre condition de mortel. Une brindille insignifiante dans le maelström du monde. La peine, la misère, l’injustice… Et pourtant, Hugo est un indécrottable optimiste. Ses critiques les plus acerbes lui reprochaient de ne pas penser, tant il croyait dans le progrès et la capacité de l’homme à évoluer vers un meilleur. Le poète Leconte de Lisle le qualifiera de bête comme l’Himalaya ». Le temps a démontré que Victor Hugo avait raison sur bien des choses. Beaucoup de ses détracteurs sont tombés dans l’oubli. Cette lucidité, cette prémonition, cette inclination à saisir l’homme dans son universalité, accompagnent le lecteur tout au long de l’œuvre hugolienne. On ne choisit ni son origine, ni sa couleur de peau Comme on rêve d’une vie de château quand on vit le ghetto Naître l’étau autour du cou comme Cosette pour Hugo … Sortir d’en bas, rêver de déchirer ce tableau », chante Calogero et Passi dans Face à la mer. Victor Hugo n’a pas fini d’inspirer. Erik Orsenna Hugo, c’est un grand frère qui vous prend par la main» Pour Erik Orsenna, Victor Hugo est un trésor un brin intimidant, mais dont il faut oser forcer la porte. Entretien - Chef du service Forum Par William Bourton Publié le 14/10/2021 à 1636 Temps de lecture 3 min L’académicien français Erik Orsenna a accepté de parrainer la collection des œuvres de Victor Hugo. Il nous explique pourquoi. Pourquoi nous engagez-vous à relire Hugo ? Parce que nous avons un trésor, et ce trésor, c’est Hugo. Mais on a un rapport paresseux avec ce trésor. On sait qu’il est là mais on se dit qu’on n’a pas besoin d’aller y voir. Et puis, quand on vous dit de le lire, par une sorte d’esprit de contradiction, vous dites non » – et quand on vous le dit à l’école, c’est encore pire… Il faut forcer la porte du trésor. Moi, je vis avec Hugo comme je vis avec La Fontaine je n’arrête pas de les lire. Hugo, c’est une planète, et la planète Hugo s’appelle l’humanité ». C’est tous les êtres humains et au fond, tous les êtres vivants en même temps. Donc allez-y, essayez ! Mais essayez hors des sentiers battus ; parce que c’est un univers complet. Explorons les trésors qui nous sont offerts... En quoi Hugo est-il un trésor » ? Hugo, c’est le » trésor dans tous les domaines. Sa poésie n’est pas connue, hormis deux, trois choses sur La légende des siècles. Mais si vous la lisez, vous allez être bouleversés parce que c’est à la fois un géant et un frère. C’est ça qui est formidable avec les plus grands écrivains, les plus grands artistes ils sont évidemment totalement inatteignables par leur taille et en même temps, ils nous parlent du plus profond d’eux-mêmes. Hugo, c’est un grand frère qui vous prend par la main. Pourquoi refuser cette main qu’il nous tend ? Mais Hugo, c’est aussi un œil, qui nous force à regarder ce qui l’embête. Ainsi, ses textes politiques sont exceptionnels. Notamment ce texte dans lequel il parle du sac du Palais d’été de Pékin Lettre au capitaine Butler, 1861. Cet édifice était une sorte de dialogue exceptionnel du XVIIIe siècle entre ce qu’il y avait de meilleur dans l’art chinois et de meilleur dans l’art européen, via les Jésuites. Et en 1860, les armées franco-britanniques ont dévasté ce palais, ce trésor absolu, comme si on avait massacré Versailles – et Versailles n’est que français. Et Hugo a fait un texte incroyable, qui est encore lu et appris, souvent par cœur, par les petits élèves chinois… Il est partout, cet homme-là. Il est avec Les travailleurs de la mer, il est avec Les Misérables… C’est l’ouvrage que vous conseilleriez pour commencer à celui qui n’aurait jamais lu Hugo ? Pourquoi pas ? Moi, j’adore L’homme qui rit. Mais ça peut être aussi Notre-Dame de Paris. Vous pouvez commencer n’importe où. Vous plongez et vous vous dites Oh, je ne savais pas qu’il avait écrit ça, je ne savais pas qu’il me parlait ». Ainsi, quand sa fille meurt, il est bouleversant, ce géant… Ce géant est bouleversant dans toutes les dimensions de notre humanité c’est ça le résumé de l’affaire. C’est comme Shakespeare, c’est comme Cervantès, c’est comme Diderot tous ces gens qui sont des univers, qui sont des trésors et qui sont des compagnons qui nous aident à vivre, qui nous aident à comprendre, qui nous aident à être plus grands et plus divers que nous. On parle de la biodiversité, mais la biodiversité il faut la mettre dans notre vie nous-mêmes. On ne peut pas lutter contre ce désastre qui est l’effondrement de la biodiversité et ne pas en soi-même être bio-divers ». C’est ça qui me frappe le plus cette contradiction entre le géant et le grand frère. Hugo est fraternel. Il a la passion de la fraternité. Il n’y a pas besoin de Dieu pour ces gens-là, l’humanité suffit. Le fil info La Une Tous Voir tout le Fil info Sur le même sujet Retrouvez grâce au Soir, l’œuvre immortelle et engagée d’un monument de la littérature. Aussi en Livres Lola Lafon réhabilite Anne Frank Quand tu écouteras cette chanson » est un dialogue entre deux écrivaines, même si l’une d’elles est morte en 1945. Lisez le premier chapitre. Par Pierre Maury Rentrée littéraire 490 fois le plaisir de plonger dans l’ailleurs Par Jean-Claude Vantroyen Critique Sepetys, Pirzâd, Millet… les poches des Livres du Soir Par Alain Lallemand Critique Monica Sabolo creuse le fait divers et se trouve Par Pierre Maury Nos quinze coups de cœur de la rentrée littéraire Par Thierry Coljon , Daniel Couvreur , Alain Lallemand , Pierre Maury, Cédric Petit , Jean-Claude Vantroyen et Jean-Marie Wynants Voir plus d'articles Allez au-delà de l'actualité Découvrez tous les changements Découvrir À la Une Basculons-nous dans une société de l’abonnement? 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Écrit d'un ton familier, le premier est truffé d'anecdotes. Le second est chargé de gravité, exaltant le génie de Balzac et méditant la mort qui est une grande égalité et une grande liberté».La mort de Balzac par Victor Hugo Le 18 août 1850, ma femme, qui avait été dans la journée pour voir Mme de Balzac, me dit que M. de Balzac se mourait. J'y courus. M. de Balzac était atteint depuis dix-huit mois d'une hypertrophie du coeur. Après la révolution de Février, il était allé en Russie et s'y était marié. Quelques jours avant son départ, je l'avais rencontré sur le boulevard; il se plaignait déjà et respirait bruyamment. En mai 1850, il était revenu en France, marié, riche et mourant. En arrivant, il avait déjà les jambes enflées. Quatre médecins consultés l'auscultèrent. L'un d'eux, M. Louis, me dit le 6 juillet Il n'a pas six semaines à vivre. C'était la même maladie que Frédéric Soulié. Le 18 août, j'avais mon oncle, le général Louis Hugo, à dîner. Sitôt levé de table, je le quittai et je pris un fiacre qui me mena avenue Fortunée, n° 14, dans le quartier Beaujon. C'était là que demeurait M. de Balzac. Il avait acheté ce qui restait de l'hôtel de M. de Beaujon, quelques corps de logis bas échappés par hasard à la démolition ; il avait magnifiquement meublé ces masures et s'en était fait un charmant petit hôtel, ayant porte cochère sur l'avenue Fortunée et pour tout jardin une cour longue et étroite où les pavés étaient coupés çà et là de plates-bandes. Je sonnai. Il faisait un clair de lune voilé de nuages. La rue était déserte. On ne vint pas. Je sonnai une seconde fois. La porte s'ouvrit. Une servante m'apparut avec une chandelle. Que veut monsieur ? » dit-elle. Elle pleurait. Je dis mon nom. On me fit entrer dans le salon qui était au rez-de- chaussée, et dans lequel il y avait, sur une console opposée à la cheminée, le buste colossal en marbre de Balzac par David. Une bougie brûlait sur une riche table ovale posée au milieu du salon et qui avait en guise de pieds six statuettes dorées du plus beau goût. Une autre femme vint qui pleurait aussi et me dit Il se meurt. Madame est rentrée chez elle. Les médecins l'ont abandonné depuis hier. Il a une plaie à la jambe gauche. La gangrène y est. Les médecins ne savent ce qu'ils font. Ils disaient que l'hydropisie de monsieur était une hydropisie couenneuse, une infiltration, c'est leur mot, que la peau et la chair étaient comme du lard et qu'il était impossible de lui faire la ponction. Eh bien, le mois dernier, en se couchant, Monsieur s'est heurté à un meuble historié, la peau s'est déchirée, et toute l'eau qu'il avait dans le corps a coulé. Les médecins ont dit Tiens ! Cela les a étonnés et depuis ce temps-là ils lui ont fait la ponction. Ils ont dit Imitons la nature. Mais il est venu un abcès à la jambe. C'est M. Roux qui l'a opéré. Hier on a levé l'appareil. La plaie, au lieu d'avoir suppuré, était rouge, sèche et brûlante. Alors ils ont dit Il est perdu ! et ne sont plus revenus. On est allé chez quatre ou cinq, inutilement. Tous ont répondu Il n'y a rien à faire. La nuit a été mauvaise. Ce matin, à neuf heures, monsieur ne parlait plus. Madame a fait chercher un prêtre. Le prêtre est venu et a donné à Monsieur l'extrême- onction. Monsieur a fait signe qu'il comprenait. Une heure après, il a serré la main à sa soeur, Mme de Surville. Depuis onze heures il râle et ne voit plus rien. Il ne passera pas la nuit. Si vous voulez, monsieur, je vais aller chercher M. de Surville, qui n'est pas encore couché. » La femme me quitta. J'attendis quelques instants. La bougie éclairait à peine le splendide ameublement du salon et de magnifiques peintures de Porbus et de Holbein suspendues aux murs. Le buste de marbre se dressait vaguement dans cette ombre comme le spectre de l'homme qui allait mourir. Une odeur de cadavre emplissait la maison. M. de Surville entra et me confirma tout ce que m'avait dit la servante. Je demandai à voir M. de Balzac. Nous traversâmes un corridor, nous montâmes un escalier couvert d'un tapis rouge et encombré d'objets d'art, vases, statues, tableaux, crédences portant des émaux, puis un autre corridor, et j'aperçus une porte ouverte. J'entendis un râlement haut et sinistre. J'étais dans la chambre de Balzac. Un lit était au milieu de cette chambre. Un lit d'acajou ayant au pied et à la tête des traverses et des courroies qui indiquaient un appareil de suspension destiné à mouvoir le malade. M. de Balzac était dans ce lit, la tête appuyée sur un monceau d'oreillers auxquels on avait ajouté des coussins de damas rouge empruntés au canapé de la chambre. Il avait la face violette, presque noire, inclinée à droite, la barbe non faite, les cheveux gris et coupés courts, l'oeil ouvert et fixe. Je le voyais de profil, et il ressemblait ainsi à l'Empereur. Une vieille femme, la garde, et un domestique se tenaient debout des deux côtés du lit. Une bougie brûlait derrière le chevet sur une table, une autre sur une commode près de la porte. Un vase d'argent était posé sur la table de nuit. Cet homme et cette femme se taisaient avec une sorte de terreur et écoutaient le mourant râler avec bruit. La bougie au chevet éclairait vivement un portrait d'homme jeune, rose et souriant, suspendu près de la cheminée. Une odeur insupportable s'exhalait du lit. Je soulevai la couverture et je pris la main de Balzac. Elle était couverte de sueur. Je la pressai. Il ne répondit pas à la pression. C'était cette même chambre où je l'étais venu voir un mois auparavant. Il était gai, plein d'espoir, ne doutant pas de sa guérison, montrant son enflure en riant. Nous avions beaucoup causé et disputé politique. Il me reprochait ma démagogie». Lui était légitimiste. Il me disait Comment avez-vous pu renoncer avec tant de sérénité à ce titre de pair de France, le plus beau après le titre de roi de France» - Il me disait aussi J'ai la maison de M. de Beaujon, moins le jardin, mais avec la tribune sur la petite église du coin de la rue. J'ai là dans mon escalier une porte qui ouvre sur l'église. Un tour de clef et je suis à la messe. Je tiens plus à cette tribune qu'au jardin.» - Quand je l'avais quitté, il m'avait reconduit jusqu'à cet escalier, marchant péniblement, et m'avait montré cette porte, et il avait crié à sa femme Surtout, fais bien voir à Hugo tous mes tableaux.» La garde me dit Il mourra au point du jour.» Je redescendis, emportant dans ma pensée cette figure livide ; en traversant le salon, je retrouvai le buste immobile, impassible, altier et rayonnant vaguement, et je comparai la mort à l'immortalité. Rentré chez moi, c'était un dimanche, je trouvai plusieurs personnes qui m'attendaient, entre autres Riza-Bey, le chargé d'affaires de Turquie, Navarrete, le poète espagnol et le comte Arrivabene, proscrit italien. Je leur dis Messieurs, l'Europe va perdre un grand esprit.» Il mourut dans la nuit. Il avait cinquante et un ans. Extrait de Chez Soi, n° 43, 10 août 1907; Site Les célébrités et la mort ses-obseques-sa-tombe-anecdote Dicours prononcé aux funérailles de M. Honoré de Balzac 29 août 1850 Messieurs, L'homme qui vient de descendre dans cette tombe était de ceux auxquels la douleur publique fait cortège. Dans les temps où nous sommes, toutes les fictions sont évanouies. Les regards se fixent désormais non sur les têtes qui règnent, mais sur les têtes qui pensent, et le pays tout entier tressaille lorsqu'une de ces têtes disparaît. Aujourd'hui, le deuil populaire, c'est la mort de l'homme de talent; le deuil national, c'est la mort de l'homme de génie. Messieurs, le nom de Balzac se mêlera à la trace lumineuse que notre époque laissera à l'avenir. M. de Balzac faisait partie de cette puissante génération des écrivains du dix-neuvième siècle qui est venue après Napoléon, de même que l'illustre pléiade du dix-septième est venue après Richelieu - comme si, dans le développement de la civilisation, il y avait une loi qui fit succéder aux dominateurs par le glaive les dominateurs de par l'esprit. M. de Balzac était un des premiers parmi les plus grands, un des plus hauts parmi les meilleurs. Ce n'est pas le lieu de dire ici tout ce qu'était cette splendide et souveraine intelligence. Tous ses livres ne forment qu'un livre, livre vivant, lumineux, profond, où l'on voit aller et venir et marcher et se mouvoir, avec je ne sais quoi d'effaré et de terrible mêlé au réel, toute notre civilisation contemporaine; livre merveilleux que le poète a intitulé comédie et qu'il aurait pu intituler histoire, qui prend toutes les formes et tous les styles, qui dépasse Tacite et qui va jusqu'à Suétone, qui traverse Beaumarchais et qui va jusqu'à Rabelais; livre qui est l'observation et qui est l'imagination; qui prodigue le vrai, l'intime, le bourgeois, le trivial, le matériel, et qui par moment, à travers toutes les réalités brusquement et largement déchirées, laisse tout à coup entrevoir le plus sombre et le plus tragique idéal. À son insu, qu'il le veuille ou non, qu'il y consente ou non, l'auteur de cette oeuvre immense et étrange est de la forte race des écrivains révolutionnaires. Balzac va droit au but. Il saisit corps à corps la société moderne. Il arrache à tous quelque chose, aux uns l'illusion, aux autres l'espérance, à ceux-ci un cri, à ceux-là un masque. Il fouille le vice, il dissèque la passion. Il creuse et sonde l'homme, l'âme, le coeur, les entrailles, le cerveau, l'abîme que chacun a en soi. Et, par un don de sa libre et vigoureuse nature, par un privilège des intelligences de notre temps qui, ayant vu de près les révolutions, aperçoivent mieux la fin de l'humanité et comprennent mieux la Providence, Balzac se dégage souriant et serein de ces redoutables études qui produisaient la mélancolie chez Molière et la misanthropie chez Rousseau. Voilà ce qu'il a fait parmi nous. Voilà l'oeuvre qu'il nous laissé, oeuvre haute et solide, robuste entassement d'assises de granit, monument, oeuvre du haut de laquelle resplendira désormais sa renommée. Les grands hommes font leur propre piédestal; l'avenir se charge de la statue. Sa mort a frappé Paris de stupeur. Depuis quelques mois il était rentré en France. Se sentant mourir, il avait voulu revoir la patrie, comme la veille d'un grand voyage on vient embrasser sa mère! Sa vie a été courte, mais pleine; plus remplie d'oeuvres que de jours! Hélas! ce travailleur puissant et jamais fatigué, ce philosophe, ce penseur, ce poète, ce génie, a vécu parmi nous de cette vie d'orages, de luttes, de querelles, de combats, commune dans tous les temps à tous les grands hommes. Aujourd'hui, le voici en paix. Il sort des contestations et des haines. Il entre, le même jour, dans la gloire et le tombeau. Il va briller désormais, au-dessus de toutes ces nuées qui sont nos têtes, parmi les étoiles de la patrie. Vous tous qui êtes ici, est-ce que vous n'êtes pas tentés de l'envier? Messieurs, quelle que soit notre douleur en présence d'une telle perte, résignons-nous à ces catastrophes. Acceptons-les dans ce qu'elles ont de poignant et de sévère. Il est bon peut-être, il est nécessaire peut-être, dans une époque comme la nôtre, que de temps en temps une grande mort communique aux esprits dévorés de doute et de scepticisme un ébranlement religieux. La Providence sait ce qu'elle fait lorsqu'elle met ainsi le peuple face à face avec le mystère suprème, et quand elle lui donne à méditer la mort qui est la grande égalité et qui est aussi la grande liberté. La Providece sait ce quelle fait, car c'est là le plus haut de tous les enseignements. Il ne peut y avoir que d'austères et sérieuses pensées dans tous les coeurs, quand un sublime esprit fait majestueusement son entrée dans l'autre vie! quand un de ces êtres qui ont plané longtemps au-dessus de la foule avec les ailes visibles du génie, déployant tout à coup ces autres ailes qu'on ne voit pas, s'enfonce brusquement dans l'inconnu! Non, ce n'est pas l'inconnu! Non, je l'ai déjà dit dans une autre occasion douloureuse, et je ne me lasserai pas de le répéter, non, ce n'est pas la nuit, c'est la lumière! Ce n'est pas la fin, c'est le commencement! Ce n'est pas le néant, c'est l'éternité! N'est-il pas vrai, vous tous qui m'écoutez? De pareils cercueils démontrent l'immortalité; en présence de certains morts illustres, on sent plus distinctement les destinées divines de cette intelligence qui traverse la terre pour souffrir et pour se purifier et qu'on appelle l'homme, et l'on se dit qu'il est impossible que ceux qui ont été des génies pendant leur vie ne soient pas des âmes après leur mort! Victor Hugo, Littérature et philosophie mêlées, Tome 2 , Paris, Librairie L. Hachette et Cie, 1868 lindividu est crime pour la société. » Vitor Hugo, disours devant l’Assem lée onstituante, 1848 « Tant que la peine de mort existera, on aura froid en entrant dans une cour d’assises et il y fera nuit », Victor Hugo « La peine de mort est contraire à ce que l'humanité depuis deux mille ans a pensé de plus haut et rêve de plus Nombre de vues 463 Ce que c’est que la mort Ne dites pas mourir ; dites naître. Croyez. On voit ce que je vois et ce que vous voyez ; On est l’homme mauvais que je suis, que vous êtes ; On se rue aux plaisirs, aux tourbillons, aux fêtes ; On tâche d’oublier le bas, la fin, l’écueil, La sombre égalité du mal et du cercueil ; Quoique le plus petit vaille le plus prospère ; Car tous les hommes sont les fils du même père ; Ils sont la même larme et sortent du même oeil. On vit, usant ses jours à se remplir d’orgueil ; On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe, On monte. Quelle est donc cette aube ? C’est la tombe. Où suis-je ? Dans la mort. Viens ! Un vent inconnu Vous jette au seuil des cieux. On tremble ; on se voit nu, Impur, hideux, noué des mille noeuds funèbres De ses torts, de ses maux honteux, de ses ténèbres ; Et soudain on entend quelqu’un dans l’infini Qui chante, et par quelqu’un on sent qu’on est béni, Sans voir la main d’où tombe à notre âme méchante L’amour, et sans savoir quelle est la voix qui chante. On arrive homme, deuil, glaçon, neige ; on se sent Fondre et vivre ; et, d’extase et d’azur s’emplissant, Tout notre être frémit de la défaite étrange Du monstre qui devient dans la lumière un ange. Victor HUGO 1802-1885 . 237 300 474 22 489 310 493 119

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